Récit de Guillaume Czerw

3°C, un matin d’hiver. Sur une barque ballottée par les courants de la Loire, j’assiste, transi de froid, à une scène brute et saisissante : sous l’œil expert de Christophe Hay, chef doublement étoilé, un pêcheur remonte un poisson imposant. Un véritable monstre, fruit d’une patience infinie et d’un grand respect pour ce fleuve indomptable. Cette image résume bien La Loire, Trésors Culinaires, un ouvrage qui célèbre le terroir et dévoile l’âme d’un homme et de sa passion pour son territoire, une longue histoire qui mêle poésie et gastronomie.

Quand les éditions de La Martinière, par l’entremise d’Hélène Luzin, m’ont proposé de participer à la création de La Loire, Trésors Culinaires, j’ai tout de suite été intrigué. Bien que la Loire m’était déjà familière grâce à mes reportages passés, ce projet était la promesse d’une immersion totale dans l’univers de Christophe Hay. Ce livre est l’histoire de ce chef doublement étoilé. Il parle de son lien viscéral avec le fleuve et son écosystème unique, de la richesse culinaire des poissons d’eau douce.

Pendant une année, j’ai suivi Christophe au fil des saisons, des rives de la Loire aux cuisines de son restaurant. J’ai découvert un homme très attaché à son fleuve, dont la passion se reflète dans chaque aspect de sa gastronomie. un fervent défenseur du terroir, animé par une quête d’authenticité et d’esthétisme. Chaque moment partagé, du premier shooting par une matinée glaciale sur l’eau, aux séances où recettes et visuels prenaient vie, m’a fait découvrir l’intensité d’un chef engagé.

Capturer la puissance la Loire

La première partie de mon travail consistait à plonger dans l’univers des pêcheurs. Les mariniers, ces hommes qui travaillent sur de petites embarcations, affrontent une Loire souvent capricieuse pour ramener des poissons d’une impressionnante brutalité, comme les silures pouvant peser jusqu’à 50 kg. J’ai voulu retranscrire cette puissance à travers des lumières hivernales, froides et métallisées, et des ciels lourds. Mon but était de montrer la réalité brute, sans artifice.

Sublimer leur singularité

La deuxième étape consistait à mettre en lumière les poissons eux-mêmes. Ces créatures de la Loire, souvent méconnues et parfois effrayantes, devaient devenir les protagonistes. J’ai adopté une approche graphique en travaillant avec des lumières dessinées au flash, des ombres portées et des compositions minimalistes. Chaque cliché cherchait à transformer ces poissons en œuvres d’art naturelles, dignes d’une contemplation culinaire.

L’élégance gastronomique

Enfin, le dernier volet était consacré à l’assiette. Je voulais créer un véritable contrepoint esthétique au travail brut de la pêche. Ici, tout était dans le geste : capter les mouvements précis de Christophe dans la finalisation de ses assiettes. Les textures, les couleurs et les éléments soigneusement placés devaient transmettre toute la sophistication de son univers culinaire.

Ce projet, au-delà de sa richesse visuelle, incarne une philosophie que nous cultivons chez imprononçable : partir d’une matière brute, la comprendre et lui apporter une dimension artistique forte. Aux côtés de Christophe Hay, nous avons découvert comment une démarche en trois temps – de la nature à l’assiette – peut dévoiler toute la puissance narrative d’un terroir et d’un savoir-faire. Cette aventure a renforcé notre approche et notre vision autour de l’univers de la food et du vivant et a nourri notre envie d’accompagner les producteurs et les chefs, de continuer à découvrir, à photographier et à témoigner des richesses que le monde, la nature et les hommes peuvent nous apporter.

La Loire, trésors culinaires, aux éditions de La Martinière

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