Dans l’Oise, Isabelle et Benoît Amiel font tourner une biscuiterie-boulangerie bio artisanale avec pour mot d’ordre : le plaisir de manger et l’éthique avant le reste. Quitte à dire non, s’il le faut.

L’envie d’entreprendre : le plaisir de manger et l’éthique avant le reste

Isabelle et Benoît avaient une certitude : ils voulaient entreprendre en couple, dans le domaine de l’alimentaire. Engagés pour le bio et le local, leur démarche est avant tout guidée par le plaisir de manger et l’exigence du goût. Loin de faire du bio « par principe », ils recherchent avant tout le vrai, le juste, et le bon. Ils ouvrent La Pierre qui tourne dans un petit village de l’Oise en 2011. Ils y proposent des biscuits, puis dès 2021, du pain.

« Le biscuit, c’est un produit qui fait passer plein de valeurs écologiques et conviviales ». Le défi est peu commun : s’imposer dans un univers souvent jugé secondaire dans l’artisanat sucré. Le biscuit impose des contraintes particulières : un produit sec, petit, devant convaincre immédiatement par sa texture, son parfum et son caractère. Ici, pas de compromis : entre le travail des huiles essentielles, le sourcing des ingrédients, et l’inventivité du mariage des saveurs – le choco-menthe ou l’ultra-sésame – rien n’est laissé au hasard.

« Nous faisons exclusivement du pain au levain bio, avec des variétés de farines anciennes ». Pour ces deux passionnés, le pain est comme une matière vivante, travaillé avec rigueur et humilité. Ici, pas de baguettes « classiques », mais des pains aux formes brutes, aux croûtes généreuses, pensés pour être aussi bons que digestes.

Le pain de La Pierre Qui Tourne est au levain bio

Naturopathes de formation, anciens responsables de magasin bio, Isabelle et Benoît ont un parcours atypique et cohérent. Leurs expertises, ils la mettent aussi à profit dans leur artisanat : « Benoît a une spécialisation en aromathérapie. Nous utilisons les huiles essentielles dans nos biscuits afin d’éviter les arômes artificiels ». Une approche presque scientifique basée sur des années de réflexion autour du levain, du gluten, et du lien entre alimentation et bien-être.

Au fil des années, Isabelle et Benoît ont créé un endroit à leur image. Le petit atelier du début a laissé place à une boutique de 100 m²biscuits et pains côtoient les denrées de producteurs locaux ou de producteurs amis dont ils apprécient le travail. Et pour que la démarche soit la plus sincère possible, Isabelle ajoute : « Nous vendons exclusivement des produits qui se marient bien avec les nôtres ».

Faire vivre le territoire

C’est à Couloisy, village de moins de 1000 habitants, que se sont installés Isabelle et Benoît. Pour eux, c’est un acte militant et engagé : « Être à la campagne fait partie de nos valeurs. La facilité aurait été d’aller à Compiègne, mais nous voulions rester là. C’est un challenge, mais c’est la manière dont nous voulions entreprendre, faire vivre notre territoire ».

Boutique et salon de thé, La Pierre qui tourne est pensée comme un véritable lieu de vie pour les villages alentours. « Nous voulions amener les clients à découvrir notre travail. En ville, il y a une volubilité, certaines personnes ne seraient jamais venues nous voir. Nous trouvons qu’il y a du bon sens à être ici, les gens goûtent nos produits, prennent le temps de discuter avec nous de notre travail et de nos choix. S’ils aiment, ils reviennent. Il y a une très grande fidélité ».

Ici, le bio n’est pas un luxe. Isabelle et Benoît font tout pour que leurs biscuits et leurs pains au levain restent accessibles. « Travailler en bio, ça coûte cher. Mais on veut que nos prix soient alignés avec ceux d’un commerce non bio. » Pas question de réserver la qualité à ceux qui peuvent se la payer.

Et parce qu’un territoire ne vit pas sans emploi, ils veillent aussi à qui façonne la pâte. Dans leur équipe, des boulangers et pâtissiers passés par des galères, parfois sans diplôme, mais avec l’envie de s’en sortir. « On essaie d’offrir un cadre de travail sain ».

Dire oui à l’intégrité, c’est souvent dire non à beaucoup d’autres choses

En 15 ans d’existence, La Pierre qui tourne s’est créée une clientèle fidèle. Isabelle et Benoît ont construit un réseau de professionnels composé d’épiceries fines, de magasins bio ou d’hôtels. Les sollicitations sont nombreuses. Pourtant, Isabelle et Benoît sont intransigeants : quand dire oui reviendrait à trahir leurs valeurs, c’est non.

Travailler en marque blanche pour la grande distribution ? « Nous ne voulons pas travailler de cette manière. Nous avons créé notre marque, derrière il y a un univers, des valeurs. Travailler en marque blanche, c’est effacer cela, c’est renoncer à ce qui nous tient à cœur. »

« Nous préférons travailler en direct avec plein de petits commerces, cela nous permet de garder notre cohérence, notre éthique. Oui cela prend plus de temps à gérer, mais cela nous permet de rester droits dans nos bottes. »

Leur quotidien, c’est celui d’une grande famille nourrie en bio, en local, en saison. Une pratique ancrée dans la réalité et non dans la posture. Cela se sent dans leurs produits, plein de cohérence, de saveurs, de générosité, et de précision.

« On sait ce qu’on veut, et ce qu’on ne veut pas. » Se couper d’une potentielle grosse part de clientèle pour privilégier son intégrité n’est pas un choix évident, mais une démarche pleine de sincérité. La démarche est belle, rare, inspirante. À l’heure des faux-semblants, du « terroir washing », et de la course au toujours plus, l’authenticité du goût est une valeur qui fait bien.

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